Quand on vous dit « Berlioz », vous pensez quoi là tout de suite ? Les plus calés sauront citer son art, son talent, peut-être même quelques œuvres, musicales ou littéraires.
Les plus pragmatiques (et anciens !) se rappelleront du vieux billet de 10 francs.
Moi quand j’entends « Berlioz », je ne peux pas m’empêcher en plus de voir Stanislas Lefort et Méphistophélès dans la grande salle de l’Opéra de Paris. La fameuse scène de La Grande Vadrouille, Louis de Funès en chef d’orchestre qui dirige La Marche Hongroise, extraite de la Damnation de Faust. Et sa réponse à ceux qui perturbent son travail :
« Je ne veux personne dans la salle lorsque je travaille, je ne veux que Berlioz, et moi. »
On arrive à Berlioz par le chemin qu’on veut, l’important étant d’y arriver, non ?
Mais savez-vous que l’on peut même arriver chez Berlioz, et visiter la maison natale d’Hector ? Elle est en effet aujourd’hui un musée départemental, et on peut découvrir l’univers dans lequel ce grand compositeur français a grandi et connu ses premiers émois artistiques… et amoureux.
Hector Berlioz est né le 11 décembre 1803 à La Côte-Saint-André en Isère, dans la maison familiale. Une demeure datée de 1680 et acquise par la famille Berlioz dès 1730. Le jeune Berlioz y reçoit une éducation bourgeoise, d’abord au petit séminaire puis sous l’égide de son père, qui lui permet aussi de découvrir et pratiquer la musique.
Il ne quittera cette maison qu’à 18 ans pour étudier la médecine à Paris, et ainsi suivre la volonté et les traces de son père. Il renoncera pourtant à cette voie lorsque sa passion pour les arts et la musique deviendra trop forte. Il écrit lui-même en 1855* :
« Mon père qui était médecin voulut me faire suivre sa carrière. Il me donna pourtant un maître de musique et à l’âge de douze ans je commençai à composer. Arrivé à Paris je sentis ma passion pour la musique s’accroître et l’emporter sur mon désir de satisfaire mon père. Guerre de famille ; obstination de ma part. »
Ambiance… mais ça s’apaisera par la suite.
La cuisine chez les Berlioz
La cuisine se trouve au premier étage de la demeure.
Sur le même palier il y a aussi : un petit salon à manger, le cabinet du Docteur Berlioz et la chambre de son fils Hector. Les étages supérieurs de cette maison, qui en compte 4, nous permettent de visiter de nombreuses autres pièces dont un grand salon, la grande chambre parentale et natale d’Hector Berlioz, les chambres de ses sœurs. A part la cuisine et le dernier étage, toutes pièces ont un plancher. La cuisine est elle carrelée, ainsi que le quatrième étage, qui du coup devait accueillir des domestiques ou servir à stocker des marchandises ; des pièces « utiles ».
La mise en scène de cette cuisine est remarquable tant on a l’impression que le temps s’est figé, que le petit Berlioz va débarquer pour courir autour de la table. Je ne sais pas si le mobilier et les accessoires sont authentiques, mais l’émotion que j’ai pu ressentir dans cette pièce, comme dans toute la maison d’ailleurs, prouve le soin porté aux détails, la richesse et la pertinence des présentations.
En entrant, au fond à gauche, se trouve l’alcôve de la domestique, typique des maisons dauphinoises.
Cette femme, qui éleva tous les enfants Berlioz dont Hector, vivait donc dans la cuisine. Un hommage lui est rendu avec son portrait sur son chevet. Elle s’appelait Monique Nety et fût au service de la famille Berlioz jusqu’à sa mort en 1857, à l’âge de 65 ans. Les correspondances nous apprennent que Monique Nety était tout à fait intégrée à la vie de la famille, allant parfois jusqu’à s’autoriser des réflexions déplacées pour une domestique ; elle bénéficiait d’une grande affection de la part de la famille et des enfants notamment.
Après l’alcôve on découvre une pièce fermée, type « garde-manger » ou grand placard où les victuailles devaient être stockées. Puis voilà notre fameuse cheminée, si importante et ici parfaitement conservée, avec quelques accessoires dont la crémaillère.
Et enfin sur la droite, un évier en pierre, avec un système d’évacuation d’eau. Évacuation peut-être, mais pas d’arrivée d’eau bien sûr ! On est au début du XIXe siècle tout de même !
J’avoue encore mon étonnement face à cette cuisine au premier étage… A droite la porte-fenêtre donne sur le jardin en contrebas. Très belle vue. Mais pourquoi une cuisine au beau milieu d’une maison bourgeoise, et à l’étage ? Mystère. Quand j’aurai une explication je viendrai bien sûr compléter cet article.
Côté vie quotidienne, il est expliqué que les Berlioz possédaient des terres, des bois, des bêtes et même des vignes alentour. Ils en tiraient le nécessaire pour subvenir aux besoins de la famille, y compris l’huile, produite avec les noix locales bien sûr ! Les dépenses ne concernaient alors que les produits plus rares ou non alimentaires : café, savon, sucre.
Je vous laisse découvrir cette belle cuisine ainsi que le reste de la maison à l’occasion d’un passage à la Côte-Saint-André, ou à distance grâce au site internet qui est très riche aussi et qui propose même quelques pièces en visite virtuelle à 360 degrés.
http://www.musee-hector-berlioz.fr/
Si vous appréciez la musique classique, sachez que le Festival Berlioz reste une référence en la matière. Il se déroule chaque année à la fin du mois d’août à La Côte-Saint-André.
http://www.festivalberlioz.com/
Et parce que je suis une coquina qui retombe toujours sur les pattes de sa pensée, je ne résiste pas à revenir à Stanislas Lefort. Pas avec l’extrait de la Grande Vadrouille, mais avec le morceau dont il est question, et sans interruption cette fois.
Et si vous êtes bien attentifs, à 1’15, vous aurez une hallucination rétinienne… (je crois bien que le soulèvement des machines est en marche ;-)).
La marche hongroise (H. Berlioz)
https://www.youtube.com/watch?v=qhQZn2MWhR8
*Ce mini-récit autobiographique est cité par Cécile Reynaud dans son livre « Berlioz 1803-1869 »
Je remercie mon mari David qui a eu l’idée de cette visite.
Je remercie ma fille Alice à qui je dois le crédit photo de la cheminée.
De rien maman
Ah ! Ah ! Schwartzie en pince pour Berlioz !… Ça me donne envie de poursuivre dans le décalage… Quand on me dit « Berlioz », comme le suggère le début de l’article, je pense à… ben je pense à Toulouse et Marie ! Berlioz, vous savez ce gentil petit matou noiraud avec un plastron gris clair et un ruban rouge en guise de cravate… ce petit prodige musicien… qu’un grand méchant a voulu enlever à l’affection maternelle… Merci pour cet article ayant fait appel à plusieurs « concertistes » (l’idée, les photos, la rédaction composant un très bel ensemble)… Allez ! je terminerai sur un autre clin d’œil : n’oublions pas que celle « Qui brode, divine cousette,
Des arcs-en-ciel à nos chaussettes ? »
c’est, selon Brassens, la femme d’Hector !
Merci Line ! Ah oui les Aristochats, merci !
Ah oui!!! Merci chère Sophie de nous faire partager ces visites! Je fais du tourisme culturel grâce à toi, et ce, sans bouger de chez moi: génial!
Non…trêve de plaisanterie, tu donnes vraiment envie avec ces très chouettes articles!
Un petit bouquin sur les cuisines dauphinoises???…
Merci Marie ! C’est vrai que pour l’instant je parle beaucoup des cuisines dauphinoises, mais j’ai pour ambition de passer la frontière un de ces 4, « quind même » !
Merci Sophie pour ce bel article qui me donne envie d’une petite visite à la Côte-Saint-André, connu aussi pour son chocolat…! Je ne serais pas étonnée que tu en ais ramené…
Et ce billet de 10 francs, j’en avais totalement oublié l’existence… Pourtant, c’est pas si vieux…
Bises
Merci Roussette ! Une virée chocolat : je m’inscris !
Chère Sophie
Merci de nous nourrir de tant de belles escapades culturelles et gourmandes.
De plus en plus fort, après avoir réunis Onfray et Modigliani, Edika et Bruegel l’ancien, voici le nouvel exercice de style : Terminator, Berlioz et Stanilas Lefort sont dans une cuisine Terminator tombe à l’eau ………
Bravo!! A quand le livre !!
Merci Edward !
Coucou
merci pour ce bel article; mais perso je préfère « le bal de la Symphonie Fantastique « de Berlioz!!
A très bientôt!
Merci Sylvie !
A mais oui bien sûr ! Très familier aussi !
A bientôt